Les femmes sont plus affectées par les plastiques que les hommes, pour des raisons biologiques notamment : leur corps réagit différemment aux toxines. En outre, les produits d’hygiène qu’elles utilisent sont souvent contaminés.
Mais des solutions alternatives existent.
Les toxines contenues dans les matières plastiques ont des effets différents sur les hommes et les femmes, que ce soit sur le lieu de travail ou à la maison. Les raisons sont en partie biologiques – différence de taille et de proportion de tissu adipeux –, mais elles tiennent aussi au rôle dévolu aux femmes dans la société. Le corps des femmes renfermant plus de graisses que celui des hommes, il accumule davantage de substances chimiques liposolubles comme les phtalates utilisés comme plastifiants. Le corps féminin est particulièrement sensible aux toxines pendant la puberté, la grossesse, la lactation et la ménopause.
Pendant la grossesse, les conséquences sur le fœtus peuvent être graves. Les produits chimiques qui ont un fonctionnement proche de celui des hormones – connus sous le nom de perturbateurs endocriniens – posent particulièrement problème. En effet, le placenta n’offre pas une barrière étanche face à ces composés si bien qu’ils sont susceptibles d’affecter toutes les phases du développement intra-utérin que les hormones contrôlent en temps normal. Il peut s’ensuivre des malformations chez le nouveau-né, mais aussi des maladies qui ne surviennent que bien plus tard.
La production d’une serviette hygiénique n’est pas possible à l’heure actuelle sans matières premières fossiles ni plastique.
Une femme qui utilise des produits jetables quand elle a ses règles est en contact avec des plastiques dangereux pendant près de 40 ans.
Les perturbateurs endocriniens affectent tout autant les hommes que les femmes. L’Organisation mondiale de la Santé les soupçonne d’être à l’origine de formes de cancers hormono-dépendants comme celui du sein ou du testicule. Il se pourrait également qu’ils aient une incidence sur la fertilité et la qualité du sperme et qu’ils favorisent, l’obésité, le diabète, les maladies neurologiques, le déclenchement précoce de la puberté et les malformations congénitales comme la cryptorchidie (absence d’un ou des deux testicules dans le scrotum) et l’hypospadias (malformation de l’urètre chez les hommes). Un nombre croissant de nouveaux-nés ont déjà été exposés à des substances nocives.
Les circonstances dans lesquelles les femmes sont soumises aux dangers des plastiques sont multiples. Elles représentent environ 30 % des personnes employées par l’industrie du plastique dans le monde. La production à grande échelle de produits bon marché destinés à inonder la planète est facilitée par le fait que dans les pays en développement, les femmes sont employées dans les usines de fabrication à des salaires généralement bas, qui plus est dans des conditions souvent dangereuses et sans vêtement de protection. Selon une étude canadienne, les femmes qui manipulent du plastique dans les usines automobiles sont cinq fois plus susceptibles de développer un cancer du sein.
Les produits d’hygiène féminine sont eux aussi problématiques. Les tampons contiennent en effet jusqu’à 6 % de plastique et les serviettes peuvent être constituées à 90 % de plastique issu du pétrole. Tampons et serviettes renferment potentiellement les composés hormono-actifs que sont le bisphénol A (BPA) et le bisphénol S (BPS). En outre, les tampons avec applicateur contiennent souvent des phtalates. Aux États-Unis, une femme utilise entre 12 000 et 15 000 unités de ces produits au cours de sa vie. Des solutions alternatives existent toutefois sous la forme de produits lavables et réutilisables comme les coupes menstruelles.
Dans les pays en développement, nombre de femmes et de jeunes filles n’ont pas les moyens d’acheter ce type d’articles hygiéniques, si tant est qu’il y en ait à la vente. Les jeunes filles se retrouvent alors contraintes de manquer l’école cinq jours par mois en moyenne quand elles ont leurs règles. Des produits moins chers, plus sûrs et réutilisables résoudraient le problème et réduiraient la pollution et les déchets. En effet, la plupart des articles d’hygiène à usage unique finissent dans des décharges, dans des cours d’eau ou dans la mer et bouchent les réseaux d’assainissement.
Les produits de beauté ne sont pas non plus exempts de substances nocives. Un quart des femmes dans les pays industrialisés en utilisent jusqu’à 15 différents chaque jour. Ils contiennent en général pas moins de 100 produits chimiques dont certains sont dangereux pour la santé, et parfois aussi des microplastiques susceptibles de passer dans le placenta, donc dans le fœtus.
Soulignons également que les femmes sont souvent en charge du ménage, que ce soit professionnellement ou dans leur foyer. Or les produits d’entretien contiennent eux aussi des microplastiques et des substances dangereuses comme les agents de surface et les solvants. Il est donc souhaitable de choisir ses produits avec attention et d’utiliser des matériaux qui ne nuisent pas à l’environnement, ou encore d’opter pour des produits classiques comme le savon doux ou l’acide citrique afin d’alléger la facture sanitaire et environnementale. Mais ces choix de consommation ne doivent pas dispenser les producteurs de renoncer aux ingrédients nocifs et de choisir d’autres matières premières.
Les déchets qui sont exportés vers les pays en développement s’accumulent sur des décharges qui représentent une importante source de revenus pour les personnes défavorisées. Des millions de ramasseurs à travers le monde, souvent des femmes et des enfants issus des couches les plus pauvres de la société, écument ces sites à la recherche de plastiques recyclables et de déchets électriques. Ces lieux éminemment toxiques constituent souvent la seule rentrée d’argent pour les familles. Il faut brûler les câbles gainés de PVC pour mettre à nu le cuivre recherché et la fumée qui se dégage contient des dioxines hautement nocives qui nuisent à la reproduction, affectent le fœtus et peuvent entraîner des cancers. Or ce sont principalement les femmes qui brûlent les ordures ménagères dans les arrière-cours ou qui font le tri dans les décharges.
Les brevets sur les produits d’hygiène féminine se sont multipliés depuis la fin des années 1990 du fait, entre autres, du très grand nombre de plastiques bon marché.
Les populations à travers le monde ne sont pas toutes également sensibilisées aux dangers que présentent les plastiques. Les femmes sont un public cible important pour initier un changement radical dans les comportements et les pratiques quotidiennes, et pour exiger des mesures fortes au niveau politique. Elles sont souvent plus réceptives que les hommes aux différents dangers et moins enclines qu’eux à faire courir des risques aux individus et à la planète et ce, que ce soit dans la sphère professionnelle, en tant que consommatrices ou comme responsables de l’intendance de leur foyer. De nombreux éléments indiquent qu’elles agissent de façon plus responsable à l’égard de l’environnement que les hommes. Les initiatives destinées à réduire la consommation de plastique et à protéger les populations et la nature des produits polluants émanent d’ailleurs souvent d’elles. Elles ont donc toute légitimité à occuper une place égale à celle des hommes en politique, dans les entreprises, ainsi qu’au sein de leurs familles et de leurs communautés pour contribuer à l’avènement d’une société et d’une planète débarrassées du plastique et de ses toxines.