

Partant du postulat selon lequel la crise climatique nous impose de repenser en profondeur l'aménagement de nos territoires, nous avons convié les acteur.rices de la société civile à un atelier sur la réforme du Code de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme (CATU).
L'évènement s’est tenu le 12 septembre 2024 à Tourbet Sidi Boukhrissane à la Médina de Tunis. Nous avons présenté dans un premier temps les axes majeurs du CATU. Par la suite, nous avons accompagné les participant.e.s dans la collecte de recommandations spécifiques en rapport avec les domaines de préservation de l'environnement et de la résilience des communautés et territoires face au dérèglement climatique.
Les recommandations dégagées de l’atelier sur la réforme du CATU concernent essentiellement le volet relatif à l’inclusion sociale et le volet environnemental et climatique.
- Inclusion sociale :
1.Incorporer l’approche inclusive d’une manière transversale englobant la plupart des dispositions du CATU aussi bien au niveau des objectifs du code que des outils et instruments d’uranisme et d’aménagement et dans les différentes opérations urbaines.
2.Rendre accessible les services urbains vitaux aux différentes catégories sociales et particulièrement aux catégories minoritaires et marginalisées : les personnes porteuses d’handicape, les enfants, les femmes, les séniors, les réfugiés, les minorités (ethniques, sexuelles, etc), les étudiants, les personnes résidant dans des logements inadaptés, les sans-abris (penser à des centres ou bien des services qui leur seront dédiés, …)
3.Assurer une certaine accessibilité des services et d’espaces et leur proximité de leurs différents bénéficiaires (espaces verts, culturels, sportifs, de loisir et de divertissement)
4. Consacrer des articles sur la mobilité urbaine ( en terme d’accessibilité, de fréquence, de continuité, de rapidité , d’organisation et de sécurité, …) avec un accent particulier pour le transport urbain pour les personnes à mobilité réduite.
5.Consacret le droit à un logement (et/ou un foncier) résilient, décent et digne notamment aux personnes/familles précaires mais aussi aux étudiants.
6.Penser à l’hygiène dans la ville, l’équipement des espaces par des sanitaires (toilettes publiques) étant donné leur importance pour les personnes atteintes de maladies chroniques ou certaines catégories comme les femmes ou les personnes âgées ou les enfants Cela permet de rendre les villes mieux habitables, accessibles et accueillantes pour tou.te.s.
7. Mieux concevoir et concrétiser l’approche genre et les besoins particuliers des femmes notamment leur droit à la participation dans la prise de décision urbaine. Cette approche devrait être appliquée tout au long du processus de prise de décision. Une telle participation citoyenne joue un rôle primordial dans l’émergence de dynamiques de la ville et dans la ville et au sentiment d’appropriation.
8.Généraliser et démocratiser l’information et l’accès à l’information en matière urbaine, une information transparente , actualisée et accessible pour tous.
9.Inscrire les outils de mise en œuvre des objectifs du CATU dans la continuité des objectifs de la planification économique et social cette dernière étant très liée à la planification urbaine et territoriale
8- Accorder une plus grande importante à la digitalisation et au numérique pour rendre les villes plus sures , plus résilientes, plus smart. A titre d’exemple, les lampadaires intelligents, le fait de faciliter l’accès aux parkings de la ville, etc.
II- Considérations environnementales et climatiques :
Ce tableau récapitule les problèmes décelés par les participant.s, leurs conséquences et les solutions proposées
Problèmes/lacunes | Conséquences | Solutions |
Education environnementale |
Manque de sensibilité environnementale. Difficulté d’accès à l’information (manque de data) |
Accompagnement en matière de
Droit au recours climatique et environnementale |
Habitat anarchique |
Vulnérabilité aux aléas climatiques de plus en plus manifestes. Exposition accrue aux aléas climatiques. |
Solutionner l’étalement des habitats anarchiques Préservation de la biodiversité urbaine. |
Vision déficiente pour une ville verte, durable et intelligente |
Déséquilibre dans le bâti : logement luxueux non-abordable au détriment des logements sociaux. Pas d’implication citoyenne ou épuisement des écosystèmes/ des ressources |
Un plan local climat adapté à chaque ville selon ses spécificités. Espace citoyen Végétalisation |
Faible intégration du Changement Climatique dans le code actuel | Décalage entre le texte lié à l’aménagement et le contexte climatique et environnemental |
Alignement des engagements climatiques et environnementaux avec l’aménagement de l’urbanisme Cohérence ( et prise en considération) des stratégies nationales (NDC , SNBCRCC, stratégie de transitions écologique) |
Artificialisation du sol | Urbanisation non contrôlée | Végétalisation et désartificialisation du sol. |
Problème de l’eau | Mauvaise gestion de l’eau (non équitable) |
Economie d’eau : réservoirs de collecte d’eau, obligation dans tous les espaces, cohérence avec le code de l’eau Cartes de vulnérabilités Politiques territoriales et politiques hydrauliques |
Manque de DATA (vulnérabilité topographique, climatique, environnementale, socioéconomique, de l’eau…) | Mauvaise gestion et interprétation des Datas |
Maitrise de collecte des DATAs Maitrise de l’interprétation des Datas. Carte de sismicité , carte d’inondabilité , carte de vulnérabilité à l’élévation du niveau de la mer |
III. Synthèse des recommandations d’ordre environnemental :
1.Encourager l’émergence des Ecocités et écoquartiers qui favoriseront la synergie entre urbanisme, mobilité, énergie, eau, gestion des déchets, logement , lieu de travail et lieu de loisirs.
2.Maitriser les phénomènes d’étalement urbain au dépend des espaces verts , des terres agricoles , forestières.
3.Repenser les mobilités en favorisant les déplacements doux, économes en énergie et non polluants
4.Ramener la nature en ville en créant plus de parcs et de jardins publics et consacrer la notion de paysage et d’esthétique urbaine.
5. Intégrer dans le code les mesures de la gestion responsable et rationnelle des déchets permettant de lutter contre l’injustice environnementale.
6. Intégrer dans le code les mesures d’économie d’eau ( réservoirs de collecte d’eau, les mejels…)
7.Valoriser le savoir-faire local et de mettre en avant les pratiques ancestrales relatives à la préservation des ressources naturelles mais aussi l’identité urbaine
8 ;Développer l’agriculture urbaine afin de pallier le risque d’insécurité alimentaire qui se confirme de plus en plus avec les différentes pénuries
IV. Synthèse des recommandations d’ordre climatique :
1.Lutte contre les ilots de chaleur urbains : réduction des surfaces minéralisées et retour du végétal, choisir les matériaux selon leur albédo, favoriser les stationnements, les toitures et les murs végétalisés. Il est également important de privilégier les revêtements clairs à faible albédo (ou pouvoir de rétention de la chaleur).
2. Penser aux matériaux de construction durables, économe en énergie, l’co-construction et l’éco-innovation
3.Eviter les mesures inadéquates conduisant de manière non intentionnelle à une augmentation, plus qu’à une réduction, de la vulnérabilité au changement climatique (exemple : l’usage excessif et démesuré des climatiseurs par les citoyens et par les magasins et commerces).
4. Consacrer dans le code les outils permettant de prendre en compte les risques tel que les cartes de vulnérabilités ( aux séismes , aux inondations , à l’élévation du niveau de l’eau…)
5. Rappeler les objectifs de la justice climatique , de l’atténuation et de l’adaptation consacrés dans les conventions internationales ratifiées par la Tunisie
6.Connexion avec la communauté et plus particulièrement les plus vulnérables en amont et durant les épisodes climatiques (extrêmes) afin d’éviter les conséquences dramatiques sur les plans humain et immatériel. Il s’agit ici des systèmes d’alerte précoce capables d’anticiper le risque.
7.Prendre en compte la cohérence ( et prise en considération) des stratégies nationales (NDC , SNBCRCC, stratégie de transitions écologique) dans la planification territoriale
8..Favoriser une grande sobriété dans l’utilisation des ressources en maitrisant à la source les flux de précipitions des eaux pluviales et les pollutions associées. Il est aussi utile de réduire le ruissellement lors de fortes pluies, et de maitriser les risques d’inondation pour assurer le principe de la résilience.
9.Décliner les objectifs climatiques fixés par la Tunisie au niveau local à travers la consécration de la planification local climatique qui devrait aller de pair avec la planification local urbaine ( les PAUs)