Vers l'interdiction des sacs plastiques à usage unique en Tunisie

Atlas du Plastique

Selon le rapport de l’ONU rendu public le 5 juin 2018, on compte environ 5 000 milliards de sacs plastiques à usage unique (SPUU) consommés chaque année dans le monde, soit presque 10 millions par minute. Cette triste réalité a un impact très négatif sur a société et sur l’environnement comme l’attestent de très nombreuses études. Comme ils sont légers, les SPUU ont tendance à s’envoler et à s’éparpiller dans le milieu naturel. Ils obstruent les conduites d’eau de ruissellement, ce qui provoque des inondations dans les villes et les émanations pestilentielles des eaux usées. Consommés par le étail, ils trouvent leur chemin jusque dans la chaîne alimentaire. En plus, ils se fragmentent en micro particules qui sont ingérées par de nombreux organismes marins.

Facteurs clés pour la réussite de l'interdiction des SPUU en Tunisie

Un nouveau décret gouvernemental d’interdiction des sacs
plastiques à usage unique a été publié le 16 janvier 2020
dans le Journal Officiel de la République Tunisienne (JORT).
Le décret gouvernemental n°32 de l’année 2020 était précédé par
une série de mesures qui lui ont préparé le terrain.

En effet, compte tenu de la gravité de la situation et des problèmes
environnementaux causés par les SPUU, un conseil ministériel tenu
le 18 décembre 2015, a approuvé la réduction de l’utilisation des
SPUU et leur remplacement par d’autres sacs plus écologiques.
Cette initiative a été élaborée en concertation avec un comité de
pilotage comprenant, entre autres: la chambre syndicale nationale
des fabricants transformateurs de plastique relevant de l’Union
Tunisienne de l’Industrie du Commerce et de l’Artisanat (UTICA),
ainsi que les différents ministères concernés, afin de parvenir à la
proposition d’un texte réglementaire consensuel et à la définition
des mesures adéquates pour la mise à niveau du secteur et
l’accompagnement des industriels affectés. Le décret, préparé par
les services du ministère, a suivi un processus de révision et de
consultation et a été renvoyé à la présidence du gouvernement
pour compléter les procédures relatives à sa publication.

Une première initiative de réduction des SPUU, a été mise en
application dans les grandes surfaces à partir du 1er mars 2017, suite
à une convention qui est un accord volontaire signé entre le Ministère
des Affaires Locales et de l’Environnement (MALE) et l’UTICA en
octobre 2016. Depuis, les sacs de caisse n’étaient plus distribués dans
les supermarchés et des sacs en plastique réutilisables ont pris leur
place.

Une deuxième initiative a été mise en application par la suite dans
les pharmacies qui ont rejoint la campagne le 1er mars 2018, suite à
la signature de la convention le Syndicat des Pharmaciens d’Officine
de Tunisie (SPOT) en septembre 2017.

En quoi consiste le décret ?

Le décret fixe les types de sacs en plastique dont la production,
l’importation, la commercialisation, la détention et la distribution
sont interdites à titre gratuit ou onéreux sur le marché intérieur.
Le décret interdit plus précisément les SPUU dont l’épaisseurest inférieure
à 40 microns ou la contenance inférieure à 30 litres
et les sacs d’emballage primaire dont l’épaisseur est supérieure
à 15 microns. De même, ils seront interdits, les sacs en plastique
oxodégradables.

Par ailleurs, le décret a autorisé l’usage des sacs biodégradables à
condition de porter la mention “sac biodégradable” et la référence de
la norme ou du règlement technique pertinent. Ces sacs doivent, cela
va sans dire, répondre aux exigences de biodégradation.
A partir du 1er mars 2020, l’interdiction dans les grandes
surfaces entrera en vigueur et le 1er janvier 2021 pour la production,
l’importation, la commercialisation, la détention.

Pour assurer une bonne application du décret lors de sa mise en
circulation une étude a été commanditée par le MALE en 2017 en
accord avec l’UTICA. Cette étude avait pour objectif de réaliser un
diagnostic de la situation de la filière de production des SPUU afin
de trouver des solutions reconvertibles aux industriels aboutissant à
un plan stratégique de remise à niveau.

Le diagnostic a abouti à une meilleure compréhension du secteur
et a permis d’établir une proposition du processus de mise à niveau de
la filière et des fonds pour le financement du programme.
Etant donné que le décret cible l’interdiction des SPUU, il s’avère
important de préparer le dispositif technique et réglementaire
nécessaire pour éviter le contournement de la loi. Sur le plan
technique, deux projets de normes tunisiennes NT 22-44 (2000)
norme de référence des SPUU et la norme NT 22-45 (2000) norme
de référence des sacs de pesage sont en cours de finalisation en
concertation avec INNORPI et les parties prenantes.
Sur le plan juridique, une proposition d’un arrêté spécifiant,
les tests et les critères d’évaluation de la biodégradation des sacs
en plastiques et d’autres dispositifs réglementaires en matière de
contrôle sont en cours de finalisation.

Ceci permettra de réglementer principalement le contrôle des
matières premières et des sacs biodégradables par les autorités
compétentes, et de stopper la prolifération des sacs provenant du
secteur informel et illégal.En plus de la réglementation, le contrôle de la matière première
et des sacs biodégradables nécessite des laboratoires de contrôles et
analyses spécialisées. Les laboratoires d’organismes publics, le Centre
Technique de l’Emballage et du Conditionnement (PACKTEC) et le
Centre International des Technologies de l’Environnement de Tunis
(CITET), s’attèlent à mettre en place les tests et analyses conformément
à la norme NT 22.127 (équivalente à la norme NFEN 13.432).
En ce qui concerne la production des sacs réutilisables ou
biodégradables, Plusieurs changements s’imposent par rapport au
processus d’approvisionnement de la matière première et le procédé
de fabrication.

En outre, il serait judicieux avec l’adoption du décret, d’instaurer
urgemment un système de collecte des sacs biodégradables et
d’installer des unités de compostage industrielles.
Certes, l’intention est bonne de la part de l’Etat tunisien pour
s’opposer au problème des SPUU, mais, ce n’est que le début d’un
long processus. A une phase avancée, ce sont tous les produits en
plastique, notamment le plastique à usage unique qui devrait être
concerné par l’interdiction si la volonté d’éradiquer la problématique
du plastique est forte.

Au final, pour remédier à la prolifération des sacs en plastique,
il est important de préparer le dispositif technique et se doter de
réglementations strictes appuyées par des dispositifs efficaces et des
mesures de contrôle rigoureux, sans oublier la nécessité de trouver
des solutions urgentes au secteur informel et illégal.